Normalement, le nom de Sullivan, l'Offenbach anglais, est aussi indissociable de celui de Gilbert que l'est, disons, Jacob de Delafon ou Laurel de Hardy. Mais lorsqu'il écrivit The Prodigal Son en 1869, âgé de 27 ans, il n'avait à son actif que quelques oeuvres, une seule opérette, et surtout de grandes espérances. Ici, il s'agit d'une musique éloignée de toute conception théâtrale puisque le thème en est religieux. Dans l'oratorio 'The Prodigal Son', le modèle mendelssohnien est incontournable, autant dans l'architecture générale que dans le modeste développement du sentiment réellement religieux, à la faveur d'une vision plus humaine, mais le langage est déjà spécifiquement anglais, de par son contenu harmonique, sa solennité, et une teinte de noblesse obligée. Le 'Boer War Te Deum' est une autre paire de manches. Sullivan était devenu Sir Arthur, il ne lui restait que six mois à vivre, et il était le musicien le plus célèbre du pays ; ce Te Deum serait son dernier ouvrage achevé. Le ton mendelssohnien est toujours omniprésent, moins dans l'écriture harmonique que dans la limpidité du propos et dans une certaine gravité assez peu théâtrale. Etonnant pour un compositeur qui avait passé presque toute sa carrière sur les planches. Voilà deux oeuvres marquantes qui dévoilent une facette méconnue de ce musicien pratiquement ignoré en France.